dimanche 10 janvier 2016

Anne Clerval: "À Paris, le discours sur la mixité sociale a remplacé la lutte des classes"

Dans Paris sans le peuple (1), la géographe Anne Clerval analyse finement l’éviction des classes populaires de la capitale. Ce processus, appelé gentrification, ne tombe pas du ciel. Il est autant le fruit de la métropolisation que de l’absence, au niveau local, de politiques publiques permettant aux classes populaires de se réapproprier la ville.
Reste-t-il encore des espaces 
populaires à Paris ?
Anne Clerval. On ne peut pas répondre à cette question dans l’absolu. En Île-de-France, comme à Paris, il y a toujours de moins en moins d’ouvriers et d’employés et de plus en plus de cadres et de professions intellectuelles supérieures. À l’intérieur du périphérique, ces derniers sont passés de 21 % en 1982 à 34 % en 2008. À côté de la bourgeoisie traditionnelle se développe une petite bourgeoisie intellectuelle, avec une surreprésentation des professions de l’information, des arts et des spectacles et des étudiants. Paris intra-muros concentre à elle seule 26 % de ces dernières à l’échelle du pays. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a plus d’employés ou d’ouvriers dans la capitale. Mais ils sont sous-représentés par rapport au reste de l’Île-de-France, ou même au reste du pays. À Paris, 20 % de la population des ménages sont des ouvriers ou des employés, contre 33 % en France. Il ne reste que quelques quartiers, comme Belleville ou la Goutte-d’Or, où ils sont encore surreprésentés par rapport au profil moyen de l’ensemble de la ville. Et encore, ces zones apparaissent à peine si on les compare au profil moyen de la région.


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